Rencontres amoureuses : Les mentalités prises de vitesse par l’Internet
Un nouveau mode de rencontre est en vogue chez les jeunes femmes et les jeunes gens français de cultures musulmanes : les rencontres sur l’Internet. Utiles pour échapper aux alliances arrangées par les parents, elles permettent de trouver l’élu(e) de son cœur. Pourvu qu’il (ou elle) ne perde pas trop dans passage du virtuel au réel.
Paradoxe de ce début de siècle, à l’heure où l’essor de la communication devrait faciliter les contacts entre les deux sexes, on constate que l’approche est de plus en plus difficile, notamment chez les jeunes Françaises de cultures musulmanes. Pourtant, l’Internet est devenu en quelques années un moyen de plus en plus prisé de faire des rencontres. Les jeunes femmes (comme les jeunes hommes) en quête de l’âme sœur se trouvent confrontés à un dilemme : comment concilier modernité et tradition, subtil mélange de ce à quoi ils aspirent et du modèle que leur projettent leurs parents ?
Les schémas traditionnels ne sont plus plébiscités par les jeunes. Les mariages arrangés, co-sanguins ou avec les voisins, ne sont plus acceptés par une grande majorité, plus encline au brassage, source d’échanges. Pour les nouvelles générations, la différence de nationalité ou de tribu (de tel ou tel village) ne sont plus un frein à la relation. Zohra, une jeune cadre française d’origine marocaine, âgée de 31 ans et vivant à Paris, se bat depuis 10 ans avec ses parents à ce sujet : « Je ne veux pas me marier avec le fils de ma voisine de Meknès. Que mes parents soient d’accord ou pas, je ne changerai pas d’avis la dessus ».
Connaître son futur conjoint
Néanmoins, le poids des traditions est tel qu’il génère parfois une attitude schizophrénique ; la jeune femme voudra par elle-même trouver son partenaire, mais n’osera pas l’accoster tout simplement parce que « ça ne se fait pas » ; on entre alors dans une spirale de non-communication où les célibataires se cherchent mais ne se trouvent pas ! La jeune femme voudra donc se libérer des contraintes, tout en respectant le cadre souvent rigide et apprêté. Par exemple, elle voudra connaître son futur conjoint, en le fréquentant avant le mariage mais restera attachée à la rigueur de l’officialisation de la rencontre. Tout simplement parce qu’à ce stade, la famille est impliquée.
Sur l’Internet, on constate un foisonnement de sites de rencontres pour musulmans célibataires, signe d’une profonde mutation au sein de la communauté. La finalité de cette démarche est précisée dès le début de la relation. Les personnes se retrouvant sur ce type de site ont en commun le même but : trouver leur moitié. Le net « désinhibe » par rapport au mariage et à la mixité, qui restent encore des sujets tabous. Il facilite le premier contact, primordial. Il est un bon compromis, permet de connaître l’autre de manière progressive.
Dans un premier temps, le net permet de préserver l’anonymat, de voir si affinités il y a (centres d’intérêt, type de caractère, projets de vie…). La seconde étape, lorsque la première est franchie, est le contact téléphonique, qui permet de creuser la discussion et surtout d’avoir un premier contact sensuel (la voix, c’est très important). La rencontre physique est la phase suivante, la plus importante, celle qui va décider si oui ou non une suite va être donnée à la relation née dans le virtuel. Il ne faut pas se leurrer, l’attirance physique (quel que soit le degré d’importance qu’elle revêt suivant la sensibilité de chacun) est essentielle : il faut que le feeling passe. Commencent alors les choses sérieuses, entretenir la relation pour s’assurer du bien fondé et du sérieux de la démarche. Passer du virtuel au réel n’est pas toujours chose aisée, on a parfois tendance à idéaliser le partenaire-internaute.
Rencontrer physiquement
Malika, la jeune consultante en informatique à Marseille, âgée de 24 ans, française d’origine algérienne, a fait de nombreuses rencontres sur l’Internet. Elle se souvient qu’elle avait attendu huit mois avant de rencontrer physiquement un jeune homme qu’elle trouvait intelligent, attachant et sensible. Jusqu’au jour où elle décida enfin de le voir dans un café sur les Champs-Elysées. Et là, grande déception. Le jeune homme en question, Mounir, 32 ans, charmant comme tout, n’avait pas le physique à faire fondre son cœur. Depuis, Malika a décidé de ne plus attendre aussi longtemps avant de rencontrer une personne « virtuellement » intéressante, de façon à ne pas laisser l’imaginaire construire un scénario par trop éloigné de la réalité. « Je ne veux pas que ça reproduise car je n’ai pas envie qu’on me prenne pour une allumeuse ».
La phase ultime (et non la moindre !) est l’officialisation, quand rien ne s’oppose à la poursuite de la relation. Elle se concrétise par la présentation des familles respectives. A ce stade, on oublie (ou plutôt on feint d’occulter) le moyen par lequel la rencontre a été possible. Laissons le temps aux mentalités de s’adapter au progrès…

