Le comité ivryen défend la cause palestinienne
Depuis 1988, le Comité ivryen pour la Palestine s’est donné pour mission de développer, dans le Val de Marne, l’information et la solidarité avec le peuple palestinien. Une ardeur qui redouble, notamment par des voyages sur place, depuis la répression israélienne de la deuxième intifada.
Créé en 1988 lors de la première Intifada, le Comité ivryen pour la Palestine (CIP) a pour but de développer l’information et la solidarité avec le peuple palestinien et de promouvoir des actions humanitaires. Cela fait donc quatorze ans que le CIP organise régulièrement des initiatives publiques d’information sur la situation en Palestine occupée en direction des citoyens de la ville. Les militants distribuent des documents explicatifs afin d’alerter l’opinion publique sur l’oppression subie par le peuple palestinien. La solidarité se répartit en plusieurs champs d’action : recherche de fonds lors d’initiatives publiques, collecte d’argent lors de l’Aïd el Kebir par exemple, et actions plus concrètes comme l’accueil d’enfants palestiniens dans des familles ivryennes pour leur permettre de passer des vacances loin des champs de ruines laissés par l’occupant.
« Lors de la venue des premiers groupes d’enfants palestiniens en 1989, je me souviens de leur peur à la simple vue de l’uniforme des policiers. Quand un hélicoptère passait au-dessus de leur tête, ils se couchaient sur le sol, apeurés, comme par réflexe », se remémore Jean-Luc Carbonari, quarante ans, secrétaire de l’association. Les premières actions ont été menées en direction des comités médicaux et des comités de femmes. En 1991, l’association avait permis l’envoi de deux puéricultrices pour observer la situation des enfants et évaluer les besoins. Parmi les autres actions menées, le déplacement de délégations en Palestine constitue un élément essentiel. « Il est très important d’aller sur place pour se rendre compte de la situation d’apartheid que subissent les Palestiniens, complètement emprisonnés sur leur propre terre », explique Maurice Guenzi, cinquante-cinq ans, président de l’association. L’année suivante, le CIP accueillait deux puéricultrices palestiniennes dans des crèches municipales, afin qu’elles observent les méthodes de travail de leurs collègues françaises.
Dès les débuts de l’association, les responsables ont souhaité axer le travail en direction de l’enfance. Après s’être rendus en Cisjordanie et à Gaza, « nous nous sommes aperçu qu’il n’y avait aucune structure d’accueil pour les enfants dans les camps sous administration de l’ONU », se souvient le président. Vient alors l’idée d’œuvrer à la mise en place d’un centre de loisirs dans le camp de réfugiés de Jalazone, près de Ramallah. La grande majorité des réfugiés de ce camp ont été chassés de leur village en 1948, un village alors rasé et sur lequel est aujourd’hui construit l’aéroport Ben Gourion. Un camp où soixante pour cent des réfugiés ont moins de quinze ans. C’est finalement à l’extérieur du camp que sera construite la maison de l’enfance, entre le camp de Jalazone et le village de Jifna. Elle accueillera les enfants de six à douze ans.
Le terrain a été acheté il y a trois ans, avec une aide du Conseil général du Val de Marne et du Comité de jumelage de la ville d’Ivry. »Nous insistons sur la double mixité dans ce projet. La maison accueillera aussi bien les enfants de Jifna, à majorité chrétienne que les enfants musulmans de Jalazone et les filles autant que les garçons ». A terme, l’idée est que cet établissement devienne complètement autonome, géré par des professionnels palestiniens. Hélas, le projet demeure bloqué tant il se révèle ne plus être une priorité. Aujourd’hui, de nombreux enfants palestiniens souffrent de malnutrition du fait des bouclages et d’un appauvrissement lié à un fort taux de chômage. « C’est pourquoi nos dernières actions ont consisté à envoyer des aides financières d’urgence pour permettre aux Palestiniens d’acheter des aliments et des médicaments. La priorité est la survie des Palestiniens », analyse Amina, vingt-trois ans, étudiante en lettres modernes et secrétaire adjointe de l’association.
Oslo a démobilisé les adhérents
C’est en 1992 que l’association organise pour la première fois un voyage de jeunes ivryens en Palestine. Le second voyage n’a lieu que huit ans plus tard en août 2000, un mois avant la visite provocatrice d’Ariel Sharon sur l’esplanade des Mosquées. Entre ces deux voyages, il y eut une période interminable de négociations. Depuis sa création, l’histoire de l’association suit comme son ombre l’évolution de la situation au Proche-Orient. « Avec la signature des accords d’Oslo, nous avons constaté une accalmie, y compris dans le militantisme des adhérents. Pour beaucoup, le problème était réglé. Heureusement, le projet de la maison de l’enfance a été un élément de mobilisation. », analyse le président du CIP. Depuis deux ans et le début de l’Intifada Al Aqsa, les membres de l’association et de nombreux citoyens se sont « réveillés » et ont compris que le combat et l’action à mener étaient encore longs avant de parvenir à l’indépendance de la Palestine et à une paix juste et durable. Pour preuve, au cours des derniers mois, de nombreux adhérents ont participé à des missions civiles pour la protection du peuple palestinien. L’une de ces délégations s’est faite refoulée par les autorités israéliennes à son arrivée. Des autorités qui n’apprécient guère le soutien pacifique des sociétés civiles occidentales aux Palestiniens.
Boycott des produits israéliens
Pour optimiser son combat, le CIP s’est regroupé avec plusieurs autres comités du Val de Marne. « De nombreux comités se sont crées et se sont groupés en une sorte de fédération. Cela nous permet d’avoir plus de poids lors des initiatives de grandes ampleur, notamment pour les campagnes de solidarité », raconte Amina. Devant le refus des gouvernements européens d’appliquer la résolution du Parlement européen visant la suspension des accords avec Israël, ces associations s’engagent dans un mouvement appelant au boycott des produits israéliens.
L’association rencontre parfois des difficultés pour tenir ses initiatives. « Nous subissons ces derniers temps des intimidations et certains exercent des pressions sur les pouvoirs publics pour empêcher nos actions. Parce qu’ils sentent que l’opinion publique leur échappe, ils tentent de déplacer le conflit sur le terrain de l’affrontement communautaire ».
Pour les adhérents du CIP, il ne peut y avoir de paix sans justice. « Pour parvenir à la paix, Israël doit se retirer des territoires occupés conformément aux résolutions de l’ONU, la colonisation doit cesser, les colonies doivent être démantelées, les prisonniers politiques libérés et le droit au retour des réfugiés doit être respecté ». Persuadé que la légitimité de leur cause amènera les Palestiniens à recouvrer leur indépendance et le droit de tout peuple à disposer de lui même, le président de l’association ne peut s’empêcher de citer une phrase de l’historien israélien Yeshaiyou Leibowitz, comme pour mieux résumer sa pensée : « Un chemin part de l’humanité, passe par la nationalité et aboutit à la bestialité. C’est celui qu’Israël a emprunté après la guerre des six jours ».

